ALTITUDE 3999 : Les oubliés des 4000, le défi d'Anastasia Bouzdine

Par

L'équipe Whympr

ALTITUDE 3999 : Les oubliés des 4000, le défi d'Anastasia Bouzdine

Les sommets oubliés : le défi d'Anastasia Bouzdine


Anastasia Bouzdine, passionnée de montagne, s’est lancée un défi unique : grimper ou skier tous les sommets situés entre 3900 et 3999 mètres, surnommés "les oubliés des 4000". Ce projet, à la fois technique et poétique, vise à documenter ces sommets méconnus, offrant pourtant des paysages exceptionnels et des défis à la hauteur des plus grands alpinistes. En mettant ces sommets méconnus à l'honneur, Anastasia espère encourager les passionnés de montagne à découvrir une approche plus authentique, loin de la frénésie des sommets les plus populaires. Nous souhaitons également, à terme, ajouter ces sommets dans Whympr afin que notre communauté puisse les explorer et les vivre pleinement. C’est avec enthousiasme que nous soutenons cette initiative, qui allie exploration et protection des montagnes. Voici l'interview d'Anastasia. 

Peux-tu te présenter en quelques mots ?


Je m’appelle Anastasia, j’ai 28 ans et je vis depuis plusieurs années maintenant au cœur des Alpes suisses. Bien que j’aie grandi loin des montagnes, ces dernières m’ont toujours fascinée, que ce soit en skiant, en grimpant ou bien en arpentant leurs arêtes effilées avec mon piolet et mes crampons.
Ingénieure de formation, je travaille désormais en tant que cheffe de projet technique dans le sport, mon domaine de prédilection.
Escalader un sommet oublié, c’est un peu comme résoudre un problème à multiples inconnues : il s’agit de trouver une solution élégante, qui s’appuie sur les faiblesses de la montagne, tout en négociant avec les variables du moment ; les conditions du glacier, l’enneigement, la qualité du rocher, l’exposition, la météo, etc.

Comment t’est venue l’idée de ce projet ?

Comme la plupart des alpinistes, j’ai aussi fait mon baptême de montagnarde en franchissant la barrière symbolique du 4000m. Pourtant, au lieu d’attraper le virus du 4000m, j’ai vite déchanté en découvrant la réalité de ces sommets : des montagnes engorgées, des chutes de pierre fréquentes, des cordées stressées, pressées, une photo éclair au sommet et une file d’attente pour la descente, d’autant plus angoissée que l’heure tourne.
Or, si on regarde les sommets autour, personne. Les 3900-3999m reflètent pour moi l’essence même de la montagne : la recherche d’itinéraire si propre à l’alpinisme, le calme sauvage de ces sommets déserts, la beauté des lieux troublée uniquement par le vol des gypaètes… N’est-ce pas là ce que l’on cherche là-haut dans les montagnes ?

Quelle est ta démarche ?


J’ai donc entrepris de grimper et skier tous les sommets entre 3900 et 3999m des Alpes suisses. Mais atteindre leur sommet ne suffit pas. Pour rendre leur mérite et toute leur valeur, il me semble essentiel de documenter les lignes et les voies de ces sommets si longtemps oubliés.
En effet, ces sommets sont en général si peu parcourus que leurs topos datent de la fin du XXème siècle pour une grande partie… Or, les conditions en montagne ont tellement évolué depuis qu’il est impossible de demander aux alpinistes de s’intéresser à ces sommets si leurs topos ne sont tout simplement pas à jour. Comment préparer sa course si le topo de la montagne que l’on vise est vieux de plus de vingt ans ?
Mon objectif est de documenter les oubliés des 4000 pour les remettre au goût du jour et en faire une source d’inspiration pour nos carnets d’alpiniste.
J’ai choisi de m’intéresser particulièrement aux 3999 des Alpes suisses, qui sont les plus nombreux, mais aussi les plus proches de chez moi, afin de privilégier la mobilité douce sur l’accès à ces sommets.

Quel est ton objectif final ?


À terme, j’aimerais écrire un livre sur les oubliés des 4000. Chacun de ces sommets contient une histoire à raconter, une anecdote, et il me paraît important de leur rendre hommage afin de leur trouver une petite place dans nos listes de courses.

Où en es-tu dans ton projet ?


J’ai comptabilisé 24 sommets entre 3900 et 3999m répartis dans les Alpes suisses : 14 faisables à ski au printemps et 10 en alpinisme estival.
À ce jour, il me reste encore 10 sommets à atteindre.

Quels sont les prochains jalons ?


Parmi les nombreux imprévus du projet, il y a eu en particulier une petite surprise qui a pointé le bout de son nez cette année entre 2 ascensions pour le projet : je suis enceinte d’une petite fille, qui a prévu d’arriver pile poil pour la saison de ski 2025 !
Il va donc falloir trouver un nouvel équilibre entre la montagne, l’escalade, le ski et la naissance de ma fille. Il est clair que mon projet Altitude 3999 reste au cœur de mes projets personnels, mais le timing risque d’être impacté…
Parmi les sommets restants, il y a de magnifiques sommets à découvrir : l’Eiger, le Bietschhorn parmi les plus connus, et l’Agassizhorn, le Jägerhorn, la pointe Sud de Moming parmi les perles rares à découvrir…
Que de surprises pour 2025 !

Au-delà des sommets et des altitudes, le projet Altitude 3999 incarne une philosophie : celle de l’exploration respectueuse et de la redécouverte. Pour Anastasia, chaque sommet est une rencontre unique avec la nature, un retour à l’essentiel. Whympr salue cette initiative et espère bientôt intégrer ces sommets dans son application pour inspirer d’autres passionnés à vivre la montagne différemment. Parce qu’au-delà des pics les plus célèbres, c’est souvent dans les lieux méconnus que la magie opère.